Alors qu’il devait être engraissé pendant 31 jours puis abattu dans l’indifférence générale pour être exporté, Géo Trouvetou a été sauvé des griffes d’un système alimentaire destructeur. 10 mois plus tard, notre poulet mène une vie paisible dans un refuge. Voici son histoire.
La vie de Géo Trouvetou commence dans un immense couvoir industriel. Sa mère ? Il ne la connaîtra jamais… un numéro parmi tant d’autres. Une mère destinée à pondre encore et toujours, sans jamais voir éclore le moindre de ses oeufs.
Le couvoir est un lieu très stressant pour notre Géo. Avec des milliers d’autres poussins, il est bousculé, malmené. Il circule de main en main, de tapis roulant en tapis roulant… En bout de chaîne, on le place sans ménagement dans un robot à vacciner. Ce dernier le saisit, le retourne automatiquement puis une aiguille descend et se plante à vive allure dans sa chair. Après cela, Géo est jeté dans une caisse avec plusieurs dizaines d’autres poussins. On les charge dans le camion, les portes se ferment et le moteur démarre.
Le trajet paraît interminable à Géo. Déshydraté, il souffre de la chaleur et de l’entassement avec les autres poussins. Plusieurs d’entre eux ne survivent pas à ce trajet.
Notre poussin tient le coup : bien que sonné, il est toujours en vie lorsqu’un humain décharge sa caisse. Il se trouve alors projeté dans un hangar immense. La lumière est éblouissante et la litière est propre… pour le moment. Dans un mois, elle sera sale et humide : les bactéries y pulluleront et les jeunes animaux développeront des maladies de peau à son contact.
Mais Géo ne connaîtra pas ce funeste destin : deux jours après son arrivée, un petit groupe entre dans le bâtiment. Ils filment les conditions de vie des jeunes animaux pour les montrer au plus grand nombre. Une jeune femme porte une caisse dans les bras. Elle prend un premier poussin pour le mettre délicatement dans sa caisse, puis son regard se tourne vers Géo. La chance de sa vie. Alors que 800 millions de jeunes poulets sont élevés puis tués en France chaque année pour la consommation de viande, l’existence de Géo et de 8 autres poussins a basculé ce soir là.
Géo échappe à un mois d’enfer au sein d’un élevage intensif, mais laisse derrière lui des milliers de compagnons qui ne connaîtront jamais son bonheur. Il est malheureusement impossible pour les militants de tous les sauver, seul l’arrêt de la consommation de viande par les humains pourra mettre fin à ce massacre.
En grandissant, les anciens compagnons de Géo rempliront très vite tout l’espace du hangar. L’air y deviendra vite difficilement respirable à cause de la poussière, des odeurs d’ammoniac et de la présence de dioxyde de carbone. Chaque année, des millions de poulets meurent du fait des conditions d’élevage insalubres.
Géo, lui, est en bonne santé. Mais il a été sauvé juste à temps : quelques jours de plus dans ce hangar et les conséquences sur sa santé auraient été irrémédiables. En effet, la nourriture mise à disposition en élevage intensif est conçue pour faire prendre du poids très rapidement aux animaux, si rapidement que nombre de poulets ont du mal à se tenir debout. Ils grossissent tellement vite que leurs pattes ne parviennent plus à supporter leur propre poids. Une tête de poussin sur un corps de poulet.
Cependant, la nourriture délivrée n’est pas la seule responsable de la croissance rapide des poussins. Regardez : notre ami n’a pas 20 jours que son corps a déjà atteint une taille vraiment imposante.
Car, comme ses camarades, Géo a été sélectionné génétiquement pour avoir une croissance rapide et satisfaire ainsi les objectifs de production. C’est sa morphologie, il a été conçu comme cela. Bien que le refuge où il vit désormais en sécurité prenne soin de lui et qu’il ait la chance de pouvoir gambader à son aise et se dépenser sans compter, il n’est pas aussi svelte que ses amies les poules pondeuses.
Un des autres rescapés, Picsou, a subi encore plus directement que lui les conséquences de la sélection génétique. En effet, un jour Picsou a été bousculé par un dindon. Sa patte s’est alors tordue définitivement et il a aujourd’hui des difficultés à se déplacer normalement. Si sa croissance n’avait pas été aussi rapide, il n’aurait probablement pas eu de séquelles de cet accident malencontreux.
Quant à Géo, il mène aujourd’hui une vie paisible au refuge. Ses activités préférées ? Vadrouiller dans les prés, s'étirer de tout son long sous un arbre, picorer ou gratter le sol à la recherche de nourriture. Ah, ça, il porte vraiment bien son nom notre ami ! Il va souvent dehors prendre des bains de soleil ou s'ébrouer dans la poussière pour se nettoyer. À la grande hantise des soigneuses du refuge qui craignent que le petit animal se blesse, il adore se percher, sauter de petites barrières ou se poser en hauteur sur une pierre ou un muret.
Géo et ses 8 compagnons de sauvetage ont aujourd’hui 10 mois, 10 mois d’une vie bien remplie. Les autres ont été amenés à l’abattoir il y a bien longtemps… Ils auront vécu 31 jours de malheur en élevage intensif alors que l’espérance de vie d’un poulet est de 8 ans. Ils n’auront jamais vu la lumière du jour, ni pu se percher ou explorer un environnement stimulant. Des milliers d’autres sont morts dans l’élevage même, parfois de soif ou de faim, faute de pouvoir atteindre les mangeoires et les abreuvoirs.
Comment les humains en sont-ils arrivés là ? Probablement parce que les poulets sont des animaux qui ne leur ressemblent pas. Pourtant, il existe des personnes comme Sofia, cette jeune femme qui a sauvé Géo, ou Anaïs, qui prend soin de lui tous les jours au refuge, ou Lionel, qui refuse de manger des animaux. Des personnes comme nous, qui ont de l’empathie pour tous, animaux humains ou non humains. L’histoire de notre petit rescapé le montre bien : il ne tient qu’à nous de changer notre regard pour changer le monde.
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