Marianne : "prendre parti sans le goût de la vérité"
- Article du Mercredi 3 juillet 2013
Lettre envoyée à l'hebdomadaire Marianne suite à l'article rédigé par Daniel Bernard intitulé Une Nouvelle famille idéologique : les Végétariens paru le 29 juin 2013 dans le numéro 845, en lecture ici.
Cher journal Marianne,
Un article sur le végétarisme dans un grand média français ! Enfin ! Un journal d'envergure s'intéresse à la question ! Je l'ouvre fébrilement, pensant y lire un traitement "de fond" sur ce sujet, je lis le premier paragraphe et le ton est donné ! Je tombe des nues !
Je continue malgré tout, pensant y trouver quelques nuances, pensant même, naïvement, que ce n'est que du "second degré" mais ma déception grandit !
Je me doutais que le végétarisme serait traité sous son aspect culinaire, culturel et environnemental certes ; mais je pensais qu'il aborderait, même superficiellement, la "question animale", ne serait-ce qu'en interviewant ceux qui ont fait ce choix pour des raisons philosophiques ou éthiques. J'esperais y voir figurer les noms des grands penseurs et théoriciens de la "question animale" comme Théodore Monod ou Albert Schweitzer, de philosophes comme Jérémy Bentham, Peter Singer, Elisabeth de Fontenay ou Florence Burgat, d'éthologues comme Mark Bekoff ou Boris Cyrulnik pour ne citer qu'eux...Ou même que serait fait simplement mention de penseurs moins connus qui rédigent les Cahiers antispécistes. Bref, à un véritable article traitant des divers aspects et motivations des végétariens qui est bien loin de se limiter à une affaire de silhouette ou de santé et qui dépasse même la simple question environnementale ! Ce choix touche à notre rapport à l'Autre, fut t-il "non-humain" et le végétarisme pose cette question.
Evolution of revolution de Hartmut Kiewert
Au lieu de cela, je ne trouve que mépris et arrogance dans le ton de l'article, des idées reçues en tout genre réduisant cette idéologie à une description totalement stéréotypée de parisiens parisiannistes bobos et nombrilistes qui se poseraient visiblement de faux problèmes. On nous parle de gens pratiquant le yoga, prenant soin de leurs muscles et de leurs corps, ne laissant pas la parole à ceux qui ont choisi d'être végétariens après avoir mené une vraie - et souvent longue - réfléxion sur ce qu'est véritablement "l'animal" et sur ce que notre culture en a fait. Les fondements de l'éthique n'ont rien à voir avec des gens qui se sentiraient supérieurs et "feraient la morale" comme un personnage sorti d'un roman de la comtesse de Ségur.
Oui, le nombre de végétariens augmente mais il n'est pas encore venu le moment en France où un journal à grand tirage saura aborder cette question sans la railler.
J'ai peu d'espoir, étant donné le ton de l'article, que vous preniez la peine de publier ma réponse dans le prochain numéro. C'est une vraie déception pour moi que Marianne, que j'apprécie par ailleurs, puisse traiter d'un tel sujet de cette manière !
Christine, militante pour les animaux et adhérente L214