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La vérité sort de la bouche des enfants


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Engagé pour les animaux de longue date, Dominic Hofbauer a bien voulu répondre à nos questions et nous permettre ainsi de partager un parcours aussi révélateur qu'inspirant.

Dominic, je crois savoir que tu es végé depuis un bon bout de temps, peux-tu nous dire ce qui t’a motivé à faire ce choix ?

Bonne question ! Alors, j'ai des souvenirs plutôt confus sur "la raison" exacte qui m'a conduit à rejeter la viande en 1986. J'avais 17 ans et je me souviens juste que, parmi les choses qui m'avaient fait réfléchir à la condition des animaux, il y avait les paroles de la chanson "Meat is Murder" (j'étais tout à fait amoureux de Morrissey ^^) + le film "Soleil Vert" et le refus des gens de regarder en face la vérité concernant leur nourriture (dans ce film, la population est nourrie sans le savoir avec les cadavres des gens qui meurent). Mais je crois que le truc le plus déclencheur, c'est le jour où ma sœur de 4 ans récitait à table "Les 3 petits cochons", se réjouissant de la fin heureuse de l'histoire... tout en mangeant du jambon. La schizophrénie dans laquelle nous vivons vis à vis de ces animaux m'a alors sauté aux yeux dans toute sa perversité. Pour moi, la vérité est sortie de la bouche d'une enfant :)

Dominic avec une poule heureuse

"Aucun autre sujet que le rejet de la viande n’ouvre une perspective aussi vertigineuse sur les infinies variations de la mauvaise foi et la pauvreté argumentaire."

Comment tes proches ont-il réagi ?

 Les réactions de l'entourage ? Alors je crois qu'il n'y a aucun autre sujet que le rejet de la viande qui ouvre une perspective aussi vertigineuse sur les infinies variations de la mauvaise foi et la pauvreté argumentaire. D'une certaine manière, je crois que rien n'aurait pu me confirmer davantage dans la justesse de mon choix d'alors, et dans l'adoption d'un régime vegan (trop) longtemps après.

Peux-tu nous en dire plus sur ce qui t’as poussé à t’investir pour les animaux ?

Mon petit parcours de "militant" remonte aux premières Veggie Prides, aux premières Estivales de la question animale où j'ai rencontré beaucoup de ceux qui sont devenus mes amis d'aujourd'hui et ma "famille politique": Brigitte Gothière, David Oliver, Yves Bonnardel, Sébastien Arsac et Antoine Comiti ... et de nombreux autres ! Avec Sébastien et Antoine nous avons fondé Stopgavage en 2004. J'ai rejoint plus tard la rédaction des Cahiers antispécistes, et je travaille actuellement comme pédagogue pour l'association GAIA en Belgique, où j'habite maintenant.

Mon quotidien, c'est donc d'animer chaque jour des séances dans les écoles de Belgique sur les droits des animaux. Il faut être à 8h chaque jour dans une école différente. C'est assez crevant mais ça vaut vraiment le coup ! Je m'occupe aussi d'un site web pour les enfants et les ados qui s'intéressent à cette question : www.gaiakids.be.  En 2014, nous avons animé des centaines de journées de sensibilisation à la défense des animaux auprès de 7300 élèves du primaire et du secondaire. Les animations que nous proposons cherchent à développer l’empathie et la responsabilité, et à encourager les comportements attentifs aux autres formes de vie sensible. Il serait primordial que les assos de protection animale en France développent aussi ce genre de pédagogie dans les écoles, où les industries de la viande et du lait - pour ne citer qu'elles - sont déjà très actives et influentes.

GAIA EDUCATION / Les animations à l'école from GAIA Kids TV on Vimeo.

Comment t’es-tu retrouvé à être proche de L214 ?

En fait, je me souviens d'une discussion avec Sébastien dans un bar de Metz vers 2006. Il avait L214 en tête et ce n'était à ce stade qu'une idée imaginaire. Moins d'une dizaine d'années plus tard, je suis soufflé par la manière dont Brigitte et Sébastien ont réussi à développer une formule d'asso qui manquait cruellement en France, et qui associe intelligemment différentes approches pour donner au public accès à une information juste et représentative des pratiques d'élevage + pour provoquer la médiatisation de la question animale + profiter de chaque passage media pour aborder le problème du spécisme dans un langage accessible à un large public + motiver un réseau incroyable de bénévoles mobilisés autour d'actions intelligentes, qui tendent la main de manière positive et informent sans juger. En moins de 10 ans, L214 est devenue la bête noire du monde de l'élevage. L'année 2015 sera d'ailleurs encore marquée par des procès et des tentatives engagées par l'industrie de la viande pour museler l'association. On est nombreux à savoir que pour chacun dans l'équipe, les mots "soirées" + "week-ends" + "vacances" sont tout à fait vides de sens...

Dominic dans une école, pour les animaux

"Chaque passage media, chaque livre qui sort sur le sujet, chaque tract tendu par un militant dans la rue est une fissure supplémentaire dans le mur d'indifférence qui nous sépare d'un monde où notre considération s'étend au-delà de la frontière d'espèce."

Au long de ton parcours, as-tu vu un changement du regard qu’on porte sur les animaux dans notre société ?

A l'échelle mondiale, l’idée que rien n'a jamais été pire qu'aujourd'hui se défend, mais je trouve aussi que les temps n'ont jamais été aussi encourageants : la cause des animaux devient un vrai sujet dans nos sociétés, les alternatives végétales explosent et s'installent avec succès dans les supermarchés, la part des produits animaux dans l'alimentation baisse d'année en année, ainsi que les initiatives pour reconnaître aux animaux leur sensibilité ou leur statut de personne. Chaque passage media, chaque livre qui sort sur le sujet, chaque tract tendu par un militant dans la rue est une fissure supplémentaire dans le mur d'indifférence qui nous sépare d'un monde où notre considération s'étend au-delà de la frontière d'espèce, pour embrasser tous les êtres doués de sensations. D'une certaine manière, ce monde a déjà commencé, car on voit bien dans la faiblesse et la pauvreté des arguments qu'on nous oppose encore que la bataille des idées est, en fait, déjà gagnée. Ce n'est vraiment pas le moment de relâcher la pression !