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L’étonnante histoire de Fred, un bouc champion de l’évasion


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Fred le bouc

Fred, le bouc champion de l’évasion. Hackettstown, États-Unis.
Crédit : Robert Miller / New York Post

 

Il aurait pu s’agir d’un conte né de l’imaginaire de Charles Perrault, mais non, ce récit est bien réel. Un bouc semble avoir guidé des dizaines d’animaux hors de l’enclos d’un marché aux bestiaux d’une petite ville américaine.

 

Par ici la sortie ! C’est peut-être ce qu’a dit ce bouc (en langage de bouc, bien sûr) à des dizaines d’animaux enfermés dans un enclos lors d’une vente aux enchères à Hackettstown, une ville de 10 000 habitants située dans le nord-ouest du New Jersey, rapporte le New York Post. Ce bouc, les habitants l’ont appelé Fred. Serait-il le roi de l’évasion comme Jacques Mesrine ? Possible, à en croire Bouwe Postma, le directeur de l’établissement de vente aux enchères. L’homme raconte qu’il y a un peu plus d’un an, Fred « s’est échappé et [que] cette fois, il a décidé de revenir sur place pour libérer ses camarades ».

 

Rendons tout de suite justice à Fred, car contrairement à Mesrine – qui avait un casier judiciaire long comme le bras – le seul tort de Fred est d’être né bouc, dans un monde qui utilise les animaux comme des produits de consommation et que l’élevage n’est pas forcément un lieu de vie enviable, comme nous le dénonçons régulièrement dans nos enquêtes vidéo.

 

Pour parvenir à cette évasion digne de Chicken Run ou d’un épisode de Faites entrer l’accusé, Fred s’est servi d’une faille dans la sécurité de l’enclos. Grâce à sa perspicacité, « des dizaines de chèvres et de moutons se sont ainsi faufilés par une porte mal verrouillée », explique le journal américain. Mais « mal verrouillée » ne signifie pas complètement ouverte. Fred a en effet dû agir avec un certain acharnement pour venir à bout du portail. C’est à coup de cornes qu’il aurait fait céder l’enclos, rapportent plusieurs témoins.
 

Conséquence, la population et la police se sont organisées pour parvenir à rattraper les animaux en fuite. Il aura fallu plus d’une heure pour récupérer la plupart des fugitifs, mais pas tous. Fred ne serait donc plus le seul caprin libre de la région. Le sergent Darren Tynan, porte-parole de la police locale, explique qu’« entre 10 et 20 autres individus seraient encore en liberté ». Vont-ils rester libres ? Rien n’est moins sûr, car même si de nombreuses alternatives végétales à la consommation de produits d’origine animale existent, l’objectif était bien de récupérer ces animaux épris de liberté pour qu’ils retournent dans le circuit viande.

La grande vadrouille

Deux moutons échappés de la vente aux enchères après l’intervention de Fred. Hackettstown, États-Unis.
Crédit : Hackettstown Police / New York Post

 

Et ce n’est pas tout : le plus extraordinaire, c’est que Fred n’a pas lâché le morceau ! Visiblement conscient de ses capacités, il est revenu à la charge dès le lendemain. Le jeudi après-midi qui a suivi la grande évasion, « Fred s'est présenté devant l'installation et a donné des coups de cornes dans le portail à de nombreuses reprises, devant un troupeau d’animaux nouvellement rassemblé, apparemment dans le but de les laisser sortir », explique un témoin de la scène. Ce récit viendrait donc appuyer un peu plus l’idée que Fred se cache derrière ces évasions multiples.

 

« C'était lui [hier soir], a déclaré Bouwe Postma. Je pense que c’est le coupable. Il a dû frapper cette clôture et laisser le troupeau sortir la nuit dernière. J’en suis presque certain. Il a dû mettre beaucoup d’énergie pour y parvenir ». Pour corroborer ces dires, il n’y a qu’à s'appuyer sur les rapports officiels. Les policiers ont en effet rédigé plusieurs notes indiquant que Fred se trouvait dans la localité quelques heures avant les évasions. Ce bouc hors norme serait donc le leader de ce groupe d’animaux et aurait même expliqué sa technique à ses congénères et aux moutons présents sur place.

 

Cette histoire en fait réfléchir plus d’un sur la condition animale. « Les gens ont tendance à prendre fait et cause pour les évadés. J'avoue que j'apprécie plutôt ces évasions, mais je comprends aussi le point de vue de l'acheteur. Il a une entreprise à faire tourner », explique la maire de Hackettstown, Maria DiGiovanni. Un brin démagogique ? À vous de juger !

 

Et si vous pensez que cette histoire n’est qu’un conte anthropomorphique de militants de la cause animale, sachez que les journalistes Amanda Woods et Jennifer Bain ont rédigé leur article dans le New York Post (disponible ici) sur la base des témoignages de professionnels du monde de l’élevage, de la maire de la ville, des policiers locaux et des habitants de Hackettstown, et non d’activistes. Cet exemple de résistance et de compassion dont fait preuve Fred nous invite à remettre en question le spécisme de nos sociétés. Alors, pourquoi continuer l'exploitation et l'utilisation des animaux par les humains ? N’est-il pas temps de prendre en compte leurs intérêts ?

 

--- Mise à jour 3 septembre 2018 ---

 

Après avoir été affranchi pendant plus d'un an de le vie en élevage, Fred n’est malheureusement plus un animal libre. La police de Hackettstown a publié sur sa page Facebook le 29 août une photo de Fred avec un petit texte expliquant qu’il avait été capturé. Depuis, plus d’une centaine de commentaires appellent à l’épargner. L’histoire de ce bouc hors du commun suscite une grande empathie et le refuge pour animaux de ferme Woodstock a proposé d’offrir à Fred un nouveau lieu de vie. Pour l’instant, cette proposition est restée lettre morte.