En moins d’une semaine, les images de l’abattoir d’Alès dévoilées par L214 ont été vues près de 1 700 000 fois sur Facebook et Youtube. L’enquête, reprise par la grande majorité des médias nationaux, a suscité l’indignation de l’opinion publique. La pétition demandant la fermeture immédiate de l’abattoir a quant à elle réuni plus de 200 000 signatures en quelques jours.
Face à la polémique, Max Roustan, maire de la ville d’Alès, a ordonné la fermeture de l’abattoir « immédiate et à titre conservatoire ». Peu de temps après, le parquet a ouvert une enquête pour « actes de cruauté » sur des animaux. De son côté, le responsable de l’abattoir d’Alès a porté plainte pour « atteinte à la vie privée par fixation ou transmission de l’image des personnes. »
Invité d’Europe 1 le vendredi 16 octobre, Stéphane Le Foll, ministre de l’Agriculture, a affirmé être « vigilant pour faire respecter les règles de bien-être animal dans tous les abattoirs » et « prôner une fermeté totale par rapport aux activités des abattoirs » Questionné sur la possibilité d’une enquête d’envergure nationale, Stéphane Le Foll a estimé suffisants les enquêtes continues et les contrôles réguliers des services vétérinaires.
Stéphane Le Foll tente l’enfumage. Plusieurs alertes ont en effet été lancées auparavant contre l’abattoir d’Alès, dont une mise en demeure administrative, notifiée par la DDPP pour pratiques professionnelles non conformes. En 2014, rappelle le journal Le Monde dans un article daté du 15/10/2015, sur les 263 abattoirs recensés en France, il y a eu 104 avertissements, 60 mises en demeure et (seulement ?) deux suspensions d’agrément. Preuve s’il en est que les incidents sont monnaie courante.
L’abattoir d’Alès serait-il alors une exception ? Présenté comme une entreprise de proximité, à taille humaine (une trentaine de salariés), avec un rythme d’abattage raisonné, pratiquant aussi la mise à mort d’animaux issus de filières biologique, cet abattoir a pourtant à première vue toutes les caractéristiques d’un établissement exemplaire.
Si ces images nous sont insoutenables, c’est qu’elles nous mettent face à une impitoyable réalité, que les politiques et le lobby de la viande préfèrent garder soigneusement cachée. Cette souffrance nous apparaît universelle. Elle abolit la différence entre les humains et les autres animaux, entre « la viande » et la chair d’un être sensible. Ce que nous voyons alors, c’est la douleur nue, la peur nue, la tentative désespérée de survie, et la barbarie engendrée par l’industrie de la viande et nos modes de consommation.
Nous continuerons de démontrer par nos enquêtes qu’on ne peut pas parler de « bien-être animal » dans un abattoir, quel qu’il soit.
L’abattoir d’Alès n’est qu’un triste exemple, la partie (rendue) visible de l’iceberg. Chaque année, dans les abattoirs de France, plus d’un milliard d’animaux sont mis à mort selon des techniques identiques.
Quand bien même un hypothétique abattoir appliquerait parfaitement les règles, le stress et la terreur des animaux conduits à la mort n’en resteraient pas moins réels. Il n’existe tout simplement pas de « viande propre » ni de tuerie respectueuse.
Nous ne saurions nous contenter de la fermeture temporaire d’un abattoir ni de vagues promesses de contrôles accrus. Nous pouvons désormais souhaiter que ces pratiques soient plus souvent dénoncées, que le contrôle des abattoirs soit renforcé, mais aussi que la question de la condition animale et des alternatives véganes puisse être portée au débat public.