Bannière Marche pour la fermeture des abattoirs – Interview d’une artiste engagée

Marche pour la fermeture des abattoirs – Interview d’une artiste engagée


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En juin 2019, la Marche pour la fermeture des abattoirs se tiendra dans une quinzaine de pays. À Paris, la 8e édition aura lieu le 8 juin. En 2018, cet événement politique, rassembleur et porteur d’espoir avait rassemblé plus de 4 000 personnes. 4 000 personnes venant revendiquer la fin d’un massacre effroyable : celui des 3 millions d’animaux terrestres qui sont tués dans les abattoirs et des dizaines de millions d’animaux aquatiques qui agonisent dans les filets de pêche et sur les ponts des bateaux, chaque jour, rien qu’en France.

 

 

→ Le site de la Marche pour la fermeture des abattoirs

→ L’événement Facebook de la Marche pour la fermeture des abattoirs 2019

 

En 2018, nous avions fait appel aux talents de l’illustratrice Joëlle Merizen, qui avait su attirer le regard du public sur le triste sort réservé aux animaux d’élevage.

Cette année, c’est Diane Özdamar qui a prêté son pinceau pour la 8e Marche. Dans un style réaliste, l’illustratrice propose un visuel puissant : une vache, dont la robe représente un globe terrestre, rompt le licol qui la tire vers la mort et dirige son regard vers l’avenir, vers la vie et la liberté.

 

 

Diane, artiste engagée installée à Montréal, a accepté avec enthousiasme notre demande et s’est prêtée au jeu de l’interview, que nous partageons avec plaisir avec vous.

 

Bonjour Diane, peux-tu te présenter en quelques mots ?

Bonjour ! Je m'appelle Diane Özdamar, je suis une illustratrice et photographe française de bientôt 34 ans, expatriée à Montréal depuis avril 2017. Je suis également végane et très concernée par la cause animale. Je travaille pour la compagnie de jeux vidéo Playtika, et je consacre une bonne partie de mon temps libre à offrir des illustrations et séances photos gratuites pour des refuges et associations.

 

Comment définirais-tu ta démarche artistique ?

Pour ce qui est de mon travail d'illustration, je ne sais pas si on peut parler de démarche artistique au sens propre du terme, étant donné que je peins plutôt en fonction de l'inspiration du jour et des émotions générées par la musique que j'écoute en travaillant. En revanche, pour la partie photographie animalière, je vise à montrer sous un angle positif les animaux mal-aimés tels que les rats et autres petits rongeurs. Il me semble important de redorer l'image de ces animaux qui sont victimes de nombreux abus et souffrent d'une mauvaise réputation injustifiée.

 

Travailler pour L214 peut apparaître comme un acte engagé, es-tu toi-même sensible à la mission de l’association ?

Je suis très sensible à la mission de l'association, qui est en total accord avec mes convictions personnelles. C'est pour cette raison que j'ai immédiatement accepté de réaliser l'affiche pour la Marche pour la fermeture des abattoirs 2019, il est en effet temps que nous prenions conscience de l'impact terrible que nous avons sur la vie des animaux et sur l'environnement de manière générale.

Je ne pense pas que tout le monde ait la capacité de se sentir touché par le sort des animaux de ferme ou par l'impact environnemental de l'élevage, en revanche il me semble très important que les gens aient conscience de ce qu'implique l'achat d'œufs, de produits laitiers et de viande. Qu'ils aient un aperçu des conditions de vie qu'endurent ces animaux, un aperçu de ce qu'il se passe derrière les murs opaques d'un abattoir, pour pouvoir choisir en connaissance de cause de participer ou non à cette industrie mortifère.

J'ai pour ma part longtemps vécu dans une dissonance cognitive que j'assumais difficilement, me sentant très concernée par la souffrance des animaux mais continuant à consommer leur chair parce que c'est ce que « tout le monde faisait », et que j'avais grandi dans une famille d'agriculteurs (ma mère élevait des moutons Suffolk), où le végétarisme était perçu comme un étrange concept menant forcément à de nombreuses carences (ce qui est faux pour peu qu'on se complémente en vitamine B12 et qu’on diversifie correctement son alimentation, mais cette croyance est encore très répandue). Puis, avec le temps et mon investissement dans la protection animale, j'adoptais notamment des rats issus de sauvetages et j’en prenais régulièrement en famille d'accueil pour les soigner et leur trouver ensuite une famille définitive. Grâce aux vidéos telles que celles diffusées par L214, j'ai pu mettre des mots sur ce qui me dérangeait dans mes habitudes de consommation, prendre conscience du fait que je ne voulais absolument plus participer à ce massacre d'animaux et me tourner vers le véganisme, en 2015, après près de huit ans de végétarisme.

 

Peux-tu nous dire quelques mots sur ce visuel pour la Marche pour la fermeture des abattoirs et la façon dont tu l’as abordé ?

J'ai tout de suite beaucoup aimé le concept qui m'a été proposé, c'est un thème fort, porteur, et dont il est important de parler, comme je l'ai mentionné ci-dessus.

C'est la première fois que je peignais une vache, ce qui m'a donné beaucoup de fil à retordre quant à son anatomie. Il m'a fallu visionner des vidéos de vaches en mouvement, trouver des planches d'anatomie animale et faire plusieurs études préparatoires pour pouvoir proposer une vache assez réaliste pour générer, du moins je l'espère, de la sympathie. Nous savons tous à quoi ressemble une vache, ce qui rend une grosse erreur anatomique très facile à déceler, perturbant alors la lisibilité de l'image.

Ayant un style plutôt réaliste, j'ai souhaité pousser le détail encore plus qu'à l'accoutumée, afin de la rendre aussi « vivante » que possible pour appuyer le message.

 

 

As-tu d’autres travaux en lien avec la défense animale ?

J'ai publié l'année dernière un livre de photographies de rats domestiques, Fancy Rats, Portraits and Stories, aux éditions Amherst Media, dont la totalité des bénéfices est utilisée dans le but d'aider les animaux abandonnés dans des refuges, soit en reversant directement les bénéfices sous forme de dons, soit en investissant, plus rarement, dans de nouveaux fonds et petits décors pour étayer mon mini studio photo, et offrir des séances aux refuges et associations qui le souhaitent, afin de donner plus de visibilité aux animaux en attente d'une famille.

 

Ce livre met en avant de nombreux portraits pris lorsque j'étais famille d'accueil ainsi que des portraits des rats que j'avais adoptés, et de ceux adoptés par des amis, et donne quelques conseils pour bien s'occuper de ces adorables petits rongeurs, dont la propreté, la grande intelligence et la personnalité très marquée sont à mille lieues de l'image négative véhiculée auprès du grand public.

 

Quels sont les autres combats qui te touchent ?

De manière générale, je suis très touchée par toutes les injustices sociales. Les souffrances humaine et animale ne sont pour moi pas dissociables, je ne place pas un combat au-dessus d'un autre : on peut très bien soutenir divers organismes et tenter d'œuvrer à son échelle pour plusieurs causes, contrairement à ce qui est souvent avancé par les personnes refusant l'idée du végétarisme/véganisme. J'essaie donc de donner également de mon temps et de faire des dons à des associations humanitaires notamment d’aide aux sans-abri et de parrainage d'un enfant via Plan International pour des frais de scolarisation, à défaut de pouvoir faire plus.

 

Peux-tu nous parler de tes futurs projets ?

Je suis actuellement en train de peindre une série de portraits d'animaux humanoïdes intitulée « Alternate Evolution » (ndlr : évolution alternative). Ce qui était à la base un simple exercice pour apprendre à mieux peindre divers types de fourrure et autres textures est devenu un projet à part entière, questionnant, bien qu'encore de manière un peu confuse, notre rapport au territoire et à la violence. Je ne sais pas encore vraiment comment ce projet va évoluer, mais je pense élargir cette série de portraits à des scènes plus générales, mettant en abîme les dérives de la société humaine. Affaire à suivre ! :)

 

Merci encore Diane !

→ Découvrir le travail de Diane Özdamar

 

Rendez-vous samedi 8 juin 2019 place de la République à Paris pour revendiquer avec nous un monde sans abattoirs ! Montrons que nous sommes nombreuses et nombreux à vouloir de toutes nos forces un monde plus juste pour tous les animaux et que nous sommes plus déterminés que jamais !